Quel ouf !

Le 24 Juin 1919

Mon tout petiot Aimé,

Alors cette fois-ci, ça y est !!!

Les boches ont accepté nos conditions. Avec quelle joie, petit Loul, j’ai entendu tonner le canon nous apprenant la bonne nouvelle hier soir à 7h ! Quel ouf de satisfaction j’ai poussé ! Tout laissait prévoir qu’ils accepteraient mais dans le fond, je n’étais pas très rassurée et j’attendais avec beaucoup d’impatience le dénouement.

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Après le canon, les cloches, sonnées à toute volée, comme aux grands jours de fête, sont venues confirmer la bonne nouvelle.

Après le dîner, nous avons été reconduire Pierre à Dugny. En revenant, nous avons pris la rue Lafayette pour aller voir ce qu’il se passait sur les boulevards. Mais arrivés place de l’Opéra, nous avons eu beaucoup de mal à nous frayer un passage avec la voiture tellement il y avait du monde. Une foule ! La place était noire de monde. Tous ces gens attendaient parait-il Marthe Chenal qui devait chanter la Marseillaise du haut de l’Opéra.

   → Ecouter la Marseillaise chantée par Marthe Chenal (1915) 

Juste comme nous étions là, toute la place et l’avenue de l’Opéra se sont éclairées comme par enchantement. Nous avons été obligés de prendre la rue du 4 septembre. Après, nous sommes revenus sur les boulevards, mais que de mal pour avancer, la chaussée était encombrée de gens qui chantaient à tue-tête. Arrivés au Matin, nous avons été obligés de reprendre une petite rue. Toute une bande de voyous s’étaient accrochés par derrière à la capote. Avec ça, on s’est fait traiter de “nouveaux riches” et de “profiteurs”, quelque chose de soigné. A part ça, nous sommes très bien rentrés.

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Ce matin, je suis revenue à la maison, toujours pour le gaz. Je suis arrivée ici à 9h. L’employé est passé ½ heure après. Avec tout ça, je n’ai pas eu de tes nouvelles hier et ce matin, étant partie de bonne heure, je n’ai rien eu non plus. J’espère que tu es bien rentré à ton escadrille. J’ai hâte à présent d’avoir de tes nouvelles pour être complètement tranquille. J’espère maintenant que l’on ne tardera pas à t’envoyer à l’arrière et que j’aurai peut-être bientôt le plaisir de te voir.

Dans cet espoir et dans l’attente de tes chères nouvelles, je te quitte mon mignon Loul Aimé en t’embrassant le plus tendrement que je t’aime.

Ta petite gosse qui t’adore à la folie,

Mino

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