Enfant terrible

Paris, Le 4 Mars 1916

Mon Loulou chéri,

Le manque de nouvelles n’a pas été bien long, heureusement car je commençais à être inquiète. Ce matin, j’ai reçu tes deux gentilles lettres du 25. Comme tu vois, ce n’est pas des nouvelles bien fraîches. Elles ont mis huit jours à me parvenir. Malgré tout je m’en contente et même avec joie. Surtout que cela faisait huit jours que je n’avais pas rien, c’est bien long !

Dans une de tes lettres, tu me dis avoir été sans nouvelle aussi. C’est donc général. En ce moment, tout le monde se plaint du service postal et avec juste raison. Pourquoi interrompre la correspondance ? C’est idiot ! Enfin, je n’ai plus rien à dire puisque je suis une favorisée.

Tu me dis de te pardonner d’avoir oublié de me raconter ta soi-disante randonnée au Brésil. Mon petit chéri, je suis entièrement de ton avis, je trouve que tu avais des choses plus intéressantes à me dire que ça. Aussi, je n’ai pas à te pardonner. Si je t’en ai parlé, c’est que je voulais m’assurer de ce que Madeleine m’avait raconté. Elle dit tant d’histoires, que je ne suis pas toujours forcée de la croire.

Je préfèrerais être dans tes bras et être un peu taquinée, plutôt que tu me racontes ton aventure qu’est en somme une histoire de gosse et non pas d’enfant terrible comme tu le prétends.

Quand à la perspective de te voir blotti dans mes bras et d’en plus bouger, après ce vilain cauchemar, serait mon plus beau rêve qui se réaliserait. Après ce désir exaucé, je n’aurai plus rien à demander pour être heureuse, car ce n’est que près de toi que je suis heureuse. Mais quand sera-t-il exaucé !!!

04-03-1916

En espérant que ma lettre te trouvera en bonne santé, je t’envoie mon Loulou mille fois chéri, mes baisers les plus doux.

Celle qui t’aime de toute son âme,

Germaine

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