Le 22 Mai 1919

Mon tout petiot Aimé,

J’ai reçu hier soir ta mignonne lettre du 17. Merci petit Loul chéri, pour ma robe, tu me dis que ton sale costume me fait trotter, je crois que de mon côté, je me charge de t’en faire faire autant. Un gros bouquet de cerises sera ta bien juste récompense. Je voudrais pouvoir les donner tout de suite, hélas, cela n’est pas possible !

Dire que cette nuit, j’ai rêvé que tu étais près de moi ! J’en avais de la chance ! Nous étions au bord de la mer, et j’avais failli me noyer en voulant ramasser mes bagues qui étaient tombées tout au fond d’un port. J’avais glissé et j’étais presque déjà dans l’eau, mais tu étais là et tu m’avais rattrapée ! Hélas, ce n’était qu’un rêve, et ce matin en me réveillant, pas la moindre trace de mon Loul !

Hier soir, j’étais fort de mauvaise humeur en apprenant que l’on avait accordé un délai de huit jours aux boches. C’est dégoutant, on en finira donc pas. Tout cela retarde la démobilisation et le retour de mon Coco chéri.

Hier tantôt, j’ai été chez le dentiste. Il est très gentil. J’étais la première et je n’ai presque pas attendu. Il a travaillé ¾ d’heure après mes dents, maintenant, elles sont très propres. J’y retournerai demain, pour les nettoyer complètement et pour me faire soigner la mauvaise dent que j’aie tout au fond de la bouche. Il croit pouvoir me la sauver. Il est très chic, car il ne fait pas mal du tout.

Sur ce petit Loul, je vais te quitter pour aller faire ma toilette. Il est 10 heures et je vais déjeuner chez mon père.

En espérant que tu es toujours en bonne santé, je t’envoie mon Coco chéri les plus câlins baisers et les plus gentilles caresses de ta petite gosse qui t’aime de tout son coeur,

Mino