Le 19 Octobre 1917

Petit Loul chéri,

J’ai reçu hier soir ta mignonne lettre du 17. Toujours un jour à me parvenir.

J’espère que le vilain mal de gorge dont tu me parles est complètement passé et qu’au reçu de ma lettre, il n’y paraîtra plus. As-tu emporté ton manteau ? J’ose espérer que oui. Je le demanderai à Madame Sevette tantôt.

J’ai téléphoné tout à l’heure à Nounou pour qu’elle dise à Suzanne de m’apporter ton briquet chez Madame Schwab.

Mon petit Loul, je suis bien ennuyée en ce moment. Je t’ai dit que mon père m’avait très bien reçu à mon retour. Il a été très aimable, mais m’a fait un petit discours le soir même à peu près en ces termes : “Tu dois comprendre à présent qu’après les frais de ton séjour à la campagne, tu dois faire attention et ne rien acheter de l’hiver, pas de coquetteries en ce moment, pas de dépenses, nous sommes en guerre.”

Comment lui dire après ça que je dois 100f à ton père ? Lorsque nous avons quitté le Mesle, c’est Monsieur Sevette qui a réglé à l’hôtel pour tout le monde. Je lui avais dit : “Je n’ai pas assez d’argent en ce moment, je vous rembourserai à Paris.” J’avais payé Madame Fleuriel. Il ne me restait que très peu d’argent. Il m’avait répondu : “C’est très bien.” J’avais compté, cela me faisait 16 jours à 2 repas de 6f. Ce qui faisait 96f.

Mais mon père ne m’a pas demandé si j’avais eu assez d’argent. Si je lui dis de but en blanc, il va se mettre dans une colère et la petite vie va recommencer. Que faire ? Voilà plus de huit jours que je cherche et malheureusement, je n’ai encore rien trouvé. Je remettais de jour en jour pour t’en parler, espérant trouver une solution, hélas, rien ne m’est venu. Aussi je me décide à te demander un petit conseil. Que faut-il que je fasse ?

Le mieux, à mon idée serait de prendre mon courage à deux mains et de lui dire, pour ça, il faudrait qu’il soit très bien luné. Enfin, je tâcherai…

En espérant que tu te portes tout à fait bien à présent, je t’envoie mon Loul chéri les plus doux baisers de ta

Mino