Courses à la Samar…

Le 2 Juin 1917,

Mon petit chéri,

A l’heure qu’il est, je n’ai pas encore reçu de tes nouvelles, mais je ne désespère pas en avoir ce soir. Je t’écris tout de suite parce que je dois sortir, aussi en rentrant j’espère trouver une gentille lettre. Je vais à la Samar… faire des courses pour Germaine. Comme elle n’a pas le temps la semaine, et que le Dimanche c’est fermé, c’est moi qui lui fait.

samaritaine

La semaine prochaine, elle pourra les faire elle même, on lui a accordé la semaine anglaise après un jour de grève.

Tu sais pour mes chapeaux, j’en suis toujours au même point. Je n’ai pas de veine. On les trouve très gentils, mais c’est tout, ils restent là. Voici plus de huit jours qu’ils sont en vue. Je n’était pas contente du tout l’autre jour. La couturière les avait mis dans une armoire, aussi c’est pas ses clientes qu’auraient l’idée d’aller les pêcher là. Dans ces conditions là, ils seraient aussi bien à la maison.

Elle trouve que je les vends trop cher. Qu’est ce qu’il lui faut ? Quand on vend un chapeau 8f, je crois que l’on a pas un gros bénéfice dessus avec les fournitures !!! dans ces conditions là, c’est inutile que j’en fasse s’il faut les vendre le même prix qu’ils me reviennent. Je passe du temps pour les faire, elle quand elle fait une robe, elle fait payer la façon, et bien moi c’est pareil, avec la seule différence qu’elle, elle prend 30f pour une robe et moi je demande 3f. Je trouve que c’est pas le Pérou. Enfin, moi qui espérais gagner de l’argent, je suis chocolat. J’ai pas de veine, voilà tout.

La dessus, je vais aller faire des courses.

En attendant le plaisir de te lire et en espérant que tu es toujours en parfaite santé, je t’envoie mon mignon Lou mes plus tendres baisers,

Mino

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