Accident au Crotoy

9 heures du soir – Paris, Le 24 Mai 1916

Mon petit chéri,

Cet après-midi, je te disais sur mon petit mot que je n’avais pas eu de tes nouvelles aujourd’hui. Je me suis trompée car ce soir j’ai reçu ta gentille lettre du 23. J’ai été un peu effrayée en apprenant l’accident arrivé à votre centre.

lambert felix

Surtout n’oublie pas mes conseils. De mon côté, je n’oublierai pas les tiens et je ferai attention à moi lorsque j’irai en bicyclette. Je regarderai toujours devant moi, comme tu me l’as recommandé, afin que tu ne sois pas inquiet.

L’autre jour, je te disais qu’il m’arriverait certainement quelque chose si je continuais et que cela n’avait pas grande importance. Comme de bien entendu, tu t’es empressé de rectifier. Mais tu sais, je n’en pensais pas un mot, j’aime trop mon Loulou pour avoir de pareilles idées. Entre-nous, lorsque je prends une bûche en bécane, ce n’est pas que je le fais exprès, loin de là, ça n’a rien d’amusant.

Demain, nous devons aller faire une promenade, si le temps est meilleur qu’aujourd’hui.

Tu me dis que tu étais assez fatigué l’autre soir. Je m’en veux, c’est de ma faute. c’est moi qui t’ai presque infligé cette promenade. Aussi à l’avenir, je n’aurai plus l’idée de recommencer. Enfin, j’espère que maintenant, tu ne t’en ressens plus. Tant qu’à moi, à part les piqures, je ne m’en suis pas aperçue, de la fatigue. La preuve, c’est que je recommence demain. Aujourd’hui, j’ai le bras moins enflé, ça ne sera rien.

Cela va me sembler drôle de ne pas te voir près de moi demain. Je vais être obligée de ne pas faire la paresseuse pour monter les côtes, je n’aurai personne pour m’aider.

J’espère que tu es toujours en bonne santé et un peu reposé de tes fatigues. Dans cet espoir, je t’envoie mon Loulou adoré tous mes plus doux baisers.

Celle qui ne pense qu’à toi,

Germaine

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