Suffragettes

Paris, Le 8 Mars 1915

Mon adoré,

Que dois-tu penser de moi ? Je suis insupportable par mon entêtement. Figure-toi que je n’ai pas écrit depuis 2 jours. Je m’entête à attendre une lettre de toi pour t’écrire. Comme je ne reçois rien, je recule chaque jour ; mais aujourd’hui je me décide enfin à prendre la plume.

Il faut te dire mon petit chéri, que je suis très inquiète et très tourmentée. Ne rien recevoir et te savoir en danger, ce n’est pas drôle !

Je sais très bien que si je ne reçois rien c’est qu’il t’est impossible d’écrire. Il parait d’après mon père et beaucoup d’autres personnes, qu’il vous est défendu de donner de vos nouvelles pendant 1 mois ou si vous le faites, vos lettres resteront en souffrance. Il s’opère en ce moment un grand mouvement de troupe et l’on craint des indiscrétions. S’il faut rester 30 jours sans lettre de toi, je ne suis pas au bout de mes peines. Enfin, je ferai comme tout le monde ! J’accepterai sans me plaindre cette nouvelle épreuve.

Le temps est en ce moment aussi triste que moi. Depuis ce matin, il tombe de la neige. C’est la première fois de l’hiver qu’il en tombe tant ! Ce qui est assez rare à pareille époque. Ce temps augmente mes inquiétudes. Comme tu dois être mal mon chéri ! Si seulement j’étais près de toi, je te ferai oublier de mes caresses ce vilain temps. Je crois que je serais plus embarrassante qu’utile.

En Angleterre, les suffragettes ont demandé à faire partie de l’armée. On en a accepté 500, mais pour des services auxiliaires comme : signaleurs téléphonistes, télégraphistes, estafettes, vaguemestres, conductrices d’automobiles, etc… Qu’est-ce que les françaises attendent pour faire pareil ?

suffragettes

J’ai passé la journée d’hier Dimanche avec Madeleine. Nous avons été nous promener avec la soeur de Robert Sut sur les grands boulevards. Cette personne est vraiment charmante. Madeleine m’a prié de te souhaiter le bonjour.

Je termine en espérant que ta santé est toujours bonne et aussi recevoir de tes nouvelles. En attendant , je t’envoie mon bien-aimé, mille tendres baisers.

Celle qui t’adore,

Germaine

 

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