Le 7 Avril 1918

Mon petiot Aimé,

Aujourd’hui, je n’ai pas eu de lettre, mais hier soir, j’en ai eu une, aussi il ne faut pas être exigeante. C’était celle du 31. Toujours un intervalle de 6 jours.

Tu me demandes si Marie-Louise vient à la maison pour tout à fait. Oui mon Loul ! Et cela fait plus de huit jours qu’elle est à la maison. Ça marche jusqu’à présent assez bien avec mon père (je touche du bois). Je suis très contente de l’avoir avec moi, c’est beaucoup plus gai et je me trouve un peu moins seule. Au moins, j’ai quelqu’un avec qui je peux causer. Tandis qu’avec mon père, je ne dis jamais un mot. Il lit presque tout le temps son journal.

Marie-Louise, elle, est très exubérante et a toujours une histoire drôle à me raconter. Elle est pour moi la bonne petite amie que j’avais à Cayeux. C’est drôle, lorsqu’elle est avec moi, je ne la trouve plus pareille que de la voir une fois de temps en temps. Elle ne sait que faire pour m’être agréable. Elle qui n’a pas l’habitude de s’occuper des soins du ménage, m’aide le plus qu’elle peut. Si elle sort, elle me rapporte soit des fleurs, soit des friandises. Il faut que je la gronde, afin qu’elle ne dépense pas son argent. Aussi, lorsqu’elle partira, il me semble que je me trouverai encore plus seule. Enfin, ce n’est pas encore tout de suite. L’Opéra reste ouvert. Et ce qui la retient le plus, c’est que celles qui s’en iront ne feront plus partie de l’Opéra pendant la durée de la guerre. Aussi, elle n’a plus envie de s’en aller.

La voilà qui arrive. Hier soir, elle a couché chez elle. Il y avait Opéra. Ce soir, pareil.

Tantôt, nous irons sans doute faire un tour. A moins que Bertha se fasse entendre. Alors, mon père nous empêchera de sortir. Elle ferait bien d’attendre que nous soyons sorties !

Quelle bavarde ! Il n’y a pas moyen d’écrire. Elle me raconte qu’elle s’est levée à 11hm¼… et ainsi de suite.

Je te quitte mon tout petiot pour aller à table.

En espérant que tu es toujours en bonne santé, je t’envoie mon mignon Loul chéri les bien tendres baisers de ta gosse qui t’adore,

Mino