Le 2 Mars 1918

Petit Loul Aimé,

J’ai reçu hier tantôt ta mignonne lettre du 27. Mon pauvre petit Loul, il ne faut pas te désoler, je crois que tu te trompes et que tu t’inquiètes à tord. A mon avis, ce n’est certainement pas ce que tu crains !!!

On n’a pas trois ou quatre boutons lorsque l’on est comme ça ! On en est couvert ! Et des tout petits qui ne se voient pas. Ils sont sous la peau et forment de grandes plaques. On reconnait cette maladie aux doigts. On a, entre chaque doigt, une plaque.

Moi je suis certaine que les quatre boutons qui te tracassent sont dus au sang tout simplement. A l’approche du printemps, cela n’est pas rare. Et une bonne purgation, ou un dépuratif seraient certainement ce qui te faudrait pour les faire disparaître.

En plus de ça, petit Loul, tu dois bien penser qu’en ce moment, on ne mange pas toujours des choses très saines, surtout toi qui n’a pas en somme une nourriture bien régulière. Cela suffit pour influencer sur la peau.

Tu peux toujours, pour te rassurer complètement, aller voir le toubib, ses conseils ne peuvent pas être mauvais.

Tant qu’à moi, mon petit chéri, je me porte très bien et n’ai rien de ce que tu redoutes ! Preuve certaine que tu te trompes. J’espère que ces quelques lignes vont te tranquilliser tout à fait et que bientôt je recevrai une bonne lettre me disant que tu n’y penses plus. N’est-ce pas petit ???

Aujourd’hui, nous avons un temps affreux ! Un vrai temps à mission !!! Il tombe de la neige depuis ce matin et la température a sensiblement baissé. Je sors tantôt, mais pas loin. Je vais coudre auprès de Mme Schwab. Si je ne lui avais pas promis, je serais descendue travailler, car il y a toujours de l’ouvrage pressé.

En espérant que ta santé est tout à fait bonne à présent et que tu ne t’ennuies pas de trop à Coincy, je t’envoie mon Loul tant chéri ! les plus gentilles câlineries de ta gosse qui est folle de toi.

Mino