Comme sur des roulettes

Le 19 Juillet 1918

Petit Loul Adoré,

J’ai reçu hier soir ta mignonne lettre du 16. Une de mes dernières lettres a dû complètement te rassurer sur ce que pense Monsieur Sevette. Suzanne  n’avait pas embelli du tout la réponse. C’est nous qui n’avons pas su lire entre les lignes. Enfin, cela ne fait rien puisqu’à présent, ça marche comme sur des roulettes (et des roulettes rondes, pas des carrés !!! )

Dis-donc, mon Loul, tu me parles de grosses claques… et tu ne m’en donnes pas. Je suis déçue. Tu m’avais fait venir l’eau à la bouche en m’en parlant et puis je n’en ai pas trouvé dans la lettre. Heureusement qu’à la fin j’ai trouvé les plus douces caresses de mon tout petiot. Ça compense largement !!! Tu me dis qu’il y a bien longtemps que nous n’avons pas eu de cerises. Hélas oui !!! Plus longtemps que ça encore. J’en ai complètement perdu le goût. Tout ce que je me rappelle, c’est que c’était délicieusement bon !!! Et encore meilleur au hop et hop !!! Ce sont mes préférées.

Je voulais te demander quand Pierre  compte-t-il avoir sa permission ? Je voudrais bien savoir. Car si nous choisissons ce moment-là pour nous marier, je ne voudrais pas que ça tombe mal pour moi. Ça me ferait bien plaisir que Pierre soit là, mais tu me comprends… !!!

Ne crois-tu pas que si sa permission ne concordait pas avec la date de notre mariage, on ne lui donnerait pas 48h pour y assister ? Etant dans la même escadrille, je ne pense pas que le capitaine lui refuserait.

Et toi mon Loul, quand comptes-tu avoir ta grande permission ??? ça fait plusieurs fois que je te le demande et tu ne me réponds pas ! A quel tour en est-on ? Au 2ème ou au 3ème ? Cela va faire 3 mois le 26 que tu as eu la dernière. Je sais bien que tu ne peux en avoir une autre tout de suite. Mais pour quand à peu près ?

Il fait toujours une chaleur torride, on ne sait pas où se mettre. Comme tu dois être malheureux de ce temps-là, mon pauvre Loul, surtout toi qui ne supporte pas très bien les temps lourds. Moi, je suis molle comme une chique ! Pas le moindre petit nénerfs ! Hier, j’ai été avec Madame Schwab  et Loulou au Jardin des Plantes. On y était très bien. On a eu du mal à le quitter. On s’était installées sous les arbres, il faisait très bon.

Tantôt, je vais travailler chez Loulou. Nous associons notre solitude !!! Toto est de plus en plus sociable. Il fait un ronron pépère lorsqu’on le caresse et ne se sauve plus.

En espérant que tu es toujours en bonne santé et moins fatigué, je te quitte mon gosse de gosse très chéri en t’envoyant les plus gentils bécots de ton petit bébé qui t’aime de tout son petit coeur,

Mino

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