S’ennuyer comme une vieille croûte

Le 22 Mars 1918

Mont tout petiot chéri,

J’ai reçu hier soir ta mignonne lettre du 19. Pauvre petit chéri, qui s’ennuie aussi. Alors nous pouvons nous donner la main.

Aujourd’hui, moi j’ai moins le cafard, voici pourquoi. Suzanne m’a communiqué hier une bonne nouvelle. Elle m’a dit que tu avais écrit chez toi, pour que l’on t’envoie un certificat d’hébergement le plus tôt possible, que tu attendais ta permission d’un moment à l’autre. Est-ce vrai, petit Loul ? Alors pourquoi dis-tu que tu t’ennuies comme une vieille croûte, si tu penses venir bientôt ???

Moi, cette nouvelle m’a enlevé la vilaine bête noire et aujourd’hui, je suis plus gaie qu’hier. Je suis redevenue la sage Mino. Pourtant, tu sais petit Loul, ça ne marche pas du tout ici. Mon père n’est pas rentré à 8h et n’a pas voulu dîner. Ça fait que je n’étais pas contente, cela faisait deux fois que je mettais la table pour rien.

Enfin, cela s’est envolé, je n’y pense plus à présent puisque mon Loul va venir. Près de toi, j’oublie si vite mes ennuis. Je les trouve même petits, lorsque je suis blottie dans tes bras où je suis si bien !!!

Et puis je ne veux plus pleurer, je ne veux pas que mon Loul me trouve laide lorsqu’il viendra !

Comme une déveine, voilà que moi aussi j’ai attrapé un vilain rhume. Sans doute que j’étais jalouse du tien. Cela ne fait rien, je vais bien le soigner, afin que tu n’aies pas une sale gosse enrhumée.

Sur ce, je te quitte mon mignon chéri, pour remettre ma table. Espérons que cette fois-ci, je serai plus heureuse. Comme je les maudis, ces sales gothas, c’est de leur faute si mon père est de si mauvaise humeur.

En espérant que ton rhume à toi est fini et avoir le bonheur de t’avoir près de moi bientôt, je termine ce mot en t’envoyant mon tout petit que j’adore les plus douces câlineries de ta sale gosse,

Mino

PS : Ci-joint, tu trouveras un petit paquet renfermant les cinq dés d’un autre éléphant. Attention en l’ouvrant, ils sont si gros !

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