Vilaine grippe

Le 16 Mars 1918

Mon petit Loul chéri,

Je reçois à l’instant ta mignonne lettre du 14. Mon pauvre Loul, tu n’as vraiment pas de chance en ce moment. Pourvu que tu n’aies pas attrapé cette vilaine grippe en venant à Paris !!! J’espère que ça ne sera pas trop grave, surtout soigne-toi bien.

Je suis un peu remise de mon émotion d’hier ! Quoique ça, je me sens très fatiguée. N’étant pas bien, ça m’a un peu retournée.

Tu as sû savoir par les journaux que cette explosion ne s’était pas produite dans notre quartier comme je te l’ai dit à tort, mais bien loin d’ici, à la Courneuve. Ça a fait tellement de bruit que je croyais que c’était tout près d’ici. Je n’ai su que bien après le lieu de l’explosion.

Après t’avoir écrit, j’ai été bien vite téléphoner chez toi. Nounou m’a répondu qu’il n’y avait rien eu de ce côté et cela m’a beaucoup soulagé car je craignais que ce soit de ce côté. De la fenêtre, je voyais la fumée juste dans la direction. Comme secousse, cela a été terrible. Beaucoup de maisons du quartier ont les vitres brisées. Ici, il n’y a eu que le grillage du garde-manger de la cuisine qui a sauté. Je l’ai retrouvé le soir par terre, et tout ce qu’il y avait dans ce garde-manger était sans dessus-dessous.

Mon père n’a pas eu trop peur. Je lui ai téléphoné aussi pour le rassurer sur mon sort.

Enfin voilà encore une émotion de passée. Les gothas ne sont pas encore revenus, espérons que nous allons être tranquille pendant un bout de temps.

Tantôt, je vais travailler. Il est midi, aussi je te quitte bien vite. En espérant que cette vilaine grippe ne sera pas trop grave et en te recommandant de bien te soigner, je t’envoie mon Loulou Aimé une grosse branche de cerises à sucer qui j’espère te guériront bien vite.

Ta gosse qui ne pense qu’à toi,

Mino

 

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