Sale comme un peigne

Le 7 Novembre 1917

Petit Loul Aimé,

J’ai reçu hier soir ta mignonne petite lettre du 4. Je suis contente de te savoir bien rentré. Comme toi, j’avais pensé t’accompagner jusqu’à la gare, mais malheureusement j’y ai pensé un peu tard. Tu venais juste de descendre lorsque je me suis dit : “Dieu que je suis bête, j’aurai eu le temps de m’habiller et d’aller conduire Loul, cela m’aurait fait plus de temps à rester avec lui.” Mais il aurait fallu y penser plus tôt. Il était trop tard.

Comme un fait exprès, Dimanche je m’étais levé assez tard, plus tard que d’habitude. Il était 8h bien sonné et au lieu de faire ma toilette tout de suite comme cela arrive souvent le Dimanche, je m’étais lancée dans de grands rangements. Tous les tiroirs de mon chiffonnier y sont passés. Ce qui était pas bien pressant. Aussi, je m’en veux un peu. Cela me servira de leçon pour l’avenir. Dimanche, je serai prête à 8h½, mais je suis bien certaine que là, tu ne viendras pas ; C’est toujours lorsque je suis sale comme un peigne que tu viens me surprendre. Ainsi aujourd’hui, j’étais prête de très bonne heure et bien tu n’es pas venu et beaucoup de jours comme ça. Je vais faire exprès maintenant puisque ça me porte bonheur de ressembler au pensionnaire d’Yvonne !!!

Je vois que, bien que mes lettres ne portaient pas une adresse très complète, elles te sont tout de même parvenues. Il doit y en avoir encore à ton escadrille. Maintenant, c’est le contraire. Tes lettres mettent 2 jours et les miennes, 1 seul.

Hier, j’ai attendu Marie-Louise toute la journée et elle n’est pas venue. Cela ne m’étonne pas. Espierre avait sa permission jusqu’à demain. Il faut croire que cela marche toujours le ménage.

Tantôt, comme je te l’ai dit hier, je vais voir Mme Schwab. J’ai rendez-vous avec Loulou à 1h chez elle. Il faut que je me dépêche. Je ne crois pas que je serai en retard. Je suis prête et le déjeuner aussi. Aussitôt après avoir mangé, je me sauve. Ça ne serait pas le moment que tu viennes à l’improviste ! Ça serait pas de chance ! Toute l’après-midi, je vais avoir cette idée-là, qui va me courir derrière la tête, surtout qu’il pleut.

Sur ce, petit Loul, je te quitte. En espérant que tu n’es pas par trop triste et toujours en bonne santé, je t’envoie mon petit poupon chéri les plus grosses taquineries de ta sale gosse qui t’adore,

Mino

PS : J’ai rencontré hier matin ce veinard de Travet. Il est, il me semble, bien souvent en permission !!!……..

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