Hôtel du Boeuf noir

Le 9 Octobre 1917

Petit Loul chéri,

Avant de partir pour l’hôtel, je viens bavarder un peu avec toi. Je suis en avance, il est 9h½. Il fait un temps épouvantable pour changer. Toute la nuit nous avons eu une très forte tempête, ce qui ne m’a pas empêché de bien dormir. Ce matin, le jardin est tout détrempé, aussi je vais avoir du plaisir pour aller au Mesle à pieds. Je laisse maintenant ma bécane à l’hôtel le soir. Ton père vient me reconduire en auto, ce qui n’est pas très agréable pour lui, de quitter la salle-à-manger bien chaude pour aller au froid.

Dimanche soir, nous avons manqué de rester enlisés près de chez Mme Fleuriel. En tournant l’auto dans le petit chemin qui à mène à la ferme du vieil idiot de Père Tessier, Monsieur Sevette a trop reculé et nous étions dans l’herbe, où nous ne pouvions plus sortir. Il a fallu que je descende et que je pousse derrière. Ce qui n’était pas très commode. Enfin, nous y sommes arrivés. Aussi, hier au soir, nous avons fait attention de ne pas recommencer.

Hier tantôt, nous n’avons pas pu sortir de l’après-midi. Nous sommes restées Madame Sevette et moi dans la salle-à-manger à l’hôtel. Pour me distraire, j’ai aidé Louise à débarrasser la table. Il y avait eu beaucoup de monde à déjeuner, c’était un jour de réquisition. Pour la peine, Mme Lemonnier m’a promis un petit plat supplémentaire le jour de notre départ.

lemonnier

Le soir, vers 5h, nous avons été à la poste et de là, à la ferme. Nous rentrons maintenant pour dîner à la nuit complète, ce qui semble tout drôle.

Notre départ est toujours fixé à Jeudi. Avec ce vilain temps-là, ça ne nous engage pas à rester plus longtemps.

M. Sevette a su hier en allant à Alençon que son essence était arrivée. On doit la renvoyer ce matin au Mesle.

Tantôt, il emmène Madame Magne aux Alpes Mancelles. Ils auront encore plus vilain temps que nous.

De ce temps-là de ton côte, tu ne dois pouvoir rien faire et je suis certaine, tu dois bien t’ennuyer. Cela te permettra de bien te reposer de toutes tes fatigues et de faire la grasse matinée.

J’espère qu’à ton retour on t’aura conservé un tri-places et que tu ne seras pas obligé de monter un G6.

As-tu trouvé tes ailes à Paris ? As-tu pensé à me laisser ton briquet ?

Ecris-moi à Paris maintenant. Mme Fleuriel me prie de t’envoyer son bon souvenir ainsi que Gertrude.

En espérant que tu es toujours en bonne santé, je t’envoie mon petit poupon rose les plus douces caresses de ta sale gosse qui t’aime à la folie,

Mino

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