Les courants sont traîtres

Paris, Le 11 Avril 1916,

Mon petit chéri,

Quel vilain temps aujourd’hui !

Nous avions prémédité Suzanne, Loulou et moi d’aller faire une partie de bicyclette, mais le temps ne nous a pas favorisé, il n’a tombé qu’averse sur averse. Notre promenade s’est limitée à rester chez Loulou à travailler. Aussi, il fallait voir si nous étions contentes ! Enfin nous avons remis cette partie à après demain, en espérant avoir meilleur temps.

Suzanne m’a dit que tu avais l’intention de te baigner, ce qui ne m’étonne pas, mais fait bien attention, l’endroit est très mauvais. Je me rappelle, il y avait constamment des accidents lorsque j’étais à Cayeux. Les courants sont très traîtres à l’embouchure de la Somme.

Tu dois te dire que je suis ennuyante avec toutes mes recommandations. Mais tu comprends, c’est Suzanne qui m’a chargé de cette commission, soit disant que c’est moi que ça regarde (je comprends ça), aussi, je m’acquitte de la dite commission.

heureux baigneurs

D’après ce que j’ai compris, tes parents n’ont pas du tout l’intention d’aller te voir. S’ils pouvaient circuler librement avec la voiture, ils iraient certainement, mais comme c’est impossible…

Enfin, je voudrais bien être à la semaine de Pâques, pour savoir si oui ou non je vais te voir, car jusqu’à présent, je n’en suis pas sûre.

En attendant une de tes gentilles lettres, je t’envoie mon Loulou chéri mille doux baisers de ta petite fiancée qui pense sans cesse à toi,

Germaine

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