C’est rageant

Paris, Le 22 Septembre 1915

Petit Chéri,

J’ai reçu ta gentille lettre du 17, où je vois que décidément tu n’es pas favorisé par le courrier. Enfin, j’espère que maintenant ça marche mieux.

Tu me demandes si Robert Sut a eu ou non sa permission. Non, pas encore.

magasin louvre

Figure-toi qu’avant-hier j’ai rencontré Madeleine et sa mère au magasin du Louvre. Je l’ai trouvée très joyeuse car elle venait de recevoir une lettre de Robert lui annonçant son arrivée pour le soir même à 9h à la gare de l’Est. Aussi faisait-elle de beaux projets, que j’approuvais. Hier, j’ai appris qu’il n’était pas arrivé. Pauvre Madeleine, elle a encore moins de chance que moi. C’est rageant.

Lorsque je l’ai rencontré, j’avais avec moi une petite fille de cinq ans. Nous avons bien ri car tous les vendeurs me demandaient : “Madame désire”. Madeleine se moquait de moi à plaisir. Sans doute que ce jour-là je paraissais plus vieille que de coutume.

Sa soeur a attrapé une foulure en faisant une promenade à Hurt, elle est donc obligée de rester à Cayeux jusqu’à complète guérison de son pied. C’est décidément le pays qui veut ça, car moi-même il y a 2 ans, j’en ai eu une.

J’espère que tu es en bonne santé. Chez nous, cela va bien.

En espérant que tu reçois mieux mes lettres, je t’envoie mon petit Loulou de gros baisers de celle qui t’adore,

Germaine

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