Le 22 Juin 1919

Mon petit Loul chéri,

J’ai reçu hier soir deux mignonnes lettre de toi, celle du 18 de l’escadrille et celle du 20 de St Dizier. Tu penses mon étonnement en recevant cette dernière ! N’ayant pas reçu la lettre où tu me dis que tu allais chercher un appareil, je croyais déjà qu’on t’avait envoyé à l’arrière et j’étais toute contente. En lisant la lettre, j’ai vu qu’il n’en était rien ! C’est dommage ! Dire que tu es venu pas très loin de Paris et que je ne t’ai pas vu. Ce n’est pas de chance !

J’espère que tu es bien rentré à l’escadrille, sans incident et que tu avais un appareil qui marchait assez bien. Tu devais être bien fatigué après une nuit passée en chemin de fer ? Es-tu rentré le soir même ou le lendemain ?

Après avoir lu ta lettre de St Dizier, j’ai pris connaissance de celle de l’escadrille et je n’ai pas été très rassurée en apprenant que tu avais eu une panne de moteur. Pierre qui était là m’a expliqué ce que c’était qu’un appareil en pylône ce dont j’ignorais totalement.

Heureusement que tu as pu atterrir dans un champs ! Si tu avais été au dessus d’un bois, cela aurait été moins drôle ! Enfin, le principal est que tu t’en sois bien tiré. Malgré tout, j’ai hâte que tout cela finisse. Je ne serai complètement tranquille que lorsque tu ne me quitteras plus.

On a l’air de dire que les boches vont signer. Sur l’Intran d’hier soir, on envisageait la reprise de la démobilisation le lendemain de la signature et jusqu’à la classe 15 en trois échelons. Si c’était vrai, ça serait épatant !

Ce que t’a dit le mécanicien de l’escadrille d’Henri au sujet de son renvoi dans l’infanterie est exact. Tantante nous l’a dit l’autre jour. Mais elle ne pense pas que cela soit déjà fait. Nous avons reçu hier les confitures de l’oncle de ton camarade Marol. Nous en avons entamé une boite aux cerises. Elles sont délicieuses et faites avec du vrai sucre. Tes parents m’ont chargé de te prier de bien le remercier pour nous et de lui présenter notre meilleur souvenir. Maman vient de me dire qu’elle le remercierait elle-même en lui écrivant un petit mot. Alors c’est peut-être pas la peine que tu lui en parles.

Jojo vient de m’apporter ta mignonne lettre du 19. Tu me dis que tu vas chercher un coucou et que tu ne peux passer par Paris. Ce n’est pas de chance !

En espérant que ma lettre te trouvera en bonne santé et de retour à ton escadrille, je t’envoie mon mignon Loul Aimé les plus douces cerises de ta petite gosse qui t’aime bien tendrement,

Mino