Petitjama

Le 20 Juillet 1918

Mon petit Loul chéri,

J’ai reçu hier soir ta mignonne lettre du 17. Maintenant, c’est le soir que j’ai de tes nouvelles. Je comprends que tu te plaignes de la chaleur. On est littéralement cuits. En ce moment, je t’écris les persiennes fermées et malgré ça, j’étouffe. Comme on serait bien au bord de la mer de ce temps-là. Et encore mieux dans l’eau ! N’es-tu pas de mon avis, petit Loul ? Quand est-ce qu’on pourra y aller tous les deux ? Pas toute seule car tu sais bien que je m’ennuierais beaucoup et cela ne me ferait pas de bien.

Voyez-vous ça ! Mon Loul qui fait enrager sa gosse ! Ça m’étonne, je croyais pourtant bien que c’était ton idée un lit de cuivre. La preuve, Suzanne le pensait aussi. Tu disais tout le temps que tu voulais un lit en fer. Ça fait que j’avais fini par le croire. Je suis bien contente de savoir que tu n’y tiens pas du tout. Je vais pouvoir avoir ma chambre tant désirée. Lorsque Monsieur Sevette m’en parlera, je lui dirai que nous préférons une chambre en citronnier. Cela ne le gênera certainement pas, vu qu’un lit de cuivre coûte aussi cher qu’une chambre comme j’aime.

Comme je voudrais déjà être de retour du Mesle, pour préparer toutes ces petites choses. Ce que cela va me plaire et m’amuser. Je vais pouvoir m’acheter un “petitjama” que je mettrai en cachette bien entendu. J’en ai vu un sur les boulevards qui me plait bien. S’il y est encore à mon retour du Mesle, je me le payerai.

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Je trouve le temps long en ce moment, c’est effrayant. Je trouve les journée double de durée. Chaque matin, en enlevant un feuillet à mon aviateur, je me dis : “Comme j’en ai encore à enlever avant d’être dans les bras de mon Loul !”  De le voir rire, ça m’énerve, il a l’air de se moquer de moi. Aussi je ne le regarde plus, na ! J’espère bien que dans 2 mois, à la même date, ça sera fait. Comme cela sera peu 3 jours ! J’y pense déja, crois-tu Loul, que je suis insupportable. Heureusement, j’espère bien pouvoir partir avec toi un petit moment où tu seras. Ça sera notre voyage de noce. Pour ça, il faudrait que ça se calme un peu.

Ce matin, j’ai reçu une lettre d’une revenante : Marie-Louise. Voilà plus de 2 mois que je n’avais eu de ses nouvelles. Je la croyais malade et commençait à m’inquièter sur son sort. Il n’en est rien. Simplement une crise de flemme. Elle est en Bretagne en ce moment. D’après ce que je vois, elle a pas mal voyagé. Elle m’envoie un vrai journal ! Quelle veinarde ! Elle ne s’en fait toujours pas. Ce qu’elle doit avoir bonne mine après un long séjour à la mer. Elle me demande de tes nouvelles.

A part ça, rien de neuf.

En espérant que mon petit Coco chéri est toujours en bonne santé, je le quitte en lui envoyant les plus gentilles câlineries et les plus doux baisers de sa gosse qui pense à lui sans cesse,

Mino

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