Le 27 Mai 1918

Mon petit Loul Aimé,

Ce matin, je n’ai pas eu de lettre de toi. Voilà encore la poste qui me joue des tours. Enfin, cette fois-ci, cela me surprend moins, et je m’inquiète moins. J’espère que tu es toujours en bonne santé et que demain, je recevrai plusieurs mignonnes lettres ensemble.

Comme tu as dû le savoir, Bertha est ressuscitée. Depuis ce matin 6h20, elle nous envoie tous les quart d’heure, 20 minutes, un petit obus. Je les ai comptés. Depuis 6h20 jusqu’à 11h30, nous en avons eu 14. Depuis 11h30, elle se tait (il est 2h). Cela ne nous a pas beaucoup surpris. On se doutait bien que d’un moment à l’autre, elle se ferait entendre à nouveau. Aussi ce matin, lorsque j’ai été réveillée par le premier coup à 6h30, cela ne m’a pas étonné et je suis restée tranquillement couchée.

Tantôt, je vais chez toi. J’ai bien peur que le kanon ait encore effrayé ta grand’mère ! Cela serait bien ennuyeux, car il faudrait au contraire qu’elle soit très calme. Hier Suzanne nous a dit qu’elle allait un peu mieux mais qu’elle craignait fort un raid de gothas. Heureusement, le ciel s’est couvert sur le soir et nous n’avons pas eu d’alerte. Mais ce matin, c’est le kanon. Espérons que cela ne l’aura pas trop retournée.

Hier, nous avons passé un bon après-midi aux Champs-Elysées. Il faisait très bon.

A part ça, rien de neuf à te dire, si ce n’est que j’attends bien impatiemment de tes nouvelles.

En espérant que tu es toujours en bonne santé, je te quitte mon gosse de gosse que j’adore en t’envoyant une foule de bien douces câlineries de ta

Mino