Jalouse de Morphée

Le 26 Mai 1918

Mon petit Coco chéri,

J’ai reçu hier tantôt tes 2 mignonnes lettres en retard. Celles du 21 et 22. Je ne me suis pas très bien expliquée pourquoi elles arrivaient après celle du 23. Je crois qu’il est préférable de ne pas chercher à comprendre. Le principal est que mon gosse de gosse chéri soit toujours en excellente santé et que je sois à présent complètement rassurée sur son sort. N’est-ce pas mon Loul ?

Je ne suis pas jalouse de Morphée, quoique ça, je voudrais bien être à sa place et que ça soit dans mes bras à moi que mon Loul se plonge, ou plutôt se blottisse pour dormir. Il est vrai que je ne sais pas si je la remplacerais avantageusement !!! Puisque je suis parait-il une sale gosse ! Est-ce vrai, mon Loul ? Dis à moi ???

Tantôt, je vais comme Dimanche dernier avec Loulou  et Madame Schwab aux Champs Elysées. Suzanne doit venir nous y retrouver. Aujourd’hui, je suis moins énervée que l’autre jour. Il est vrai que je ne suis pas en retard et que la pipelette ne m’a pas gardé une lettre. Elle aurait eu du mal, car je n’en ai pas eu ce matin.

Je suis calme, très calme.

Tant qu’à user mes nerfs inutilement, rassure-toi, mon tout petiot chéri, je les réserve précieusement pour toi. Tu vois comme je suis méchante ! Je veux dire que je les passerai sur toi ! Mais ceux-là, ce ne sont pas les mêmes !!! Ce sont les nerfs de sale gosse…!!!

J’espère que tu n’as plus bobo à la tête. Tu sais mon Loul, il ne faut pas te coucher tard pour m’écrire. Lorsque tu es fatigué, met juste un mot, je vais bien, je t’envoie de douces cerises et c’est tout. Je ne veux pas te priver de quelques minutes de sommeil.

Je te quitte car voici midi.

Reçois de ta gosse qui pense sans cesse à toi, une foule de bien tendres baisers,

Mino

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