On gèle littéralement

Le 21 Avril 1918

Mon Loul Aimé,

Aujourd’hui, rien de toi. Rien d’étonnant à ça, le Dimanche, c’est une nouvelle mode à présent. Je ne reçois jamais rien. Dimanche dernier, ça m’a déjà fait ça, je me suis consolée en me disant demain, j’en aurai deux. Eh bien, pas du tout. Le lendemain, je n’en ai eu qu’une et c’est comme cela que j’ai eu ta lettre du 13 de perdue. Cela n’est pas drôle du tout, si ça se renouvelle tous les Dimanches ainsi.

Enfin, puisqu’il n’y a rien à dire, il faut se résigner.

J’espère malgré tout que tu es toujours en bonne santé et que tu ne souffres pas trop du froid. Ici, on gèle littéralement. Je viens de sortir faire le marché et bien j’ai les mains à la glace et c’est à peine si je puis écrire. On endure un feu comme en plein hiver.

Depuis hier soir, je ne sais pas ce qu’il y a, mais nous avons pas mal de coucous au dessus de nous. On craint peut-être le boche. Il est vrai que quoique froid, le temps est très beau et le ciel très clair.

Tantôt, j’ai promis à Germaine de sortir avec elle. Pourvu que la grosse Bertha reste muette jusqu’au moment de partir.

En attendant impatiemment le courrier de demain pour avoir de tes nouvelles, je te quitte, mon mien chéri en t’embrassant très très tendrement.

Ta gosse qui t’aime follement,

Mino

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