Tous les suffrages auprès de moi

Le 22 Février 1918

Tout petiot chéri,

Hier après-midi, comme je descendais porter ma lettre à la poste, j’ai été très surprise et toute joyeuse lorsque la pipelette m’a donné ta mignonne lettre du 19. Quel progrès ! J’adresse félicitations sur félicitations à la poste. Habituellement, je ne reçois tes lettres que le soir à 19h et même quelques fois, que le lendemain matin.

Tu sais, petit Loul, il ne fallait pas attacher grande importance à ce que t’a écrit Marie-Louise. Tu sais que c’est une petite rosse, aussi c’est sans doute pour te faire enrager qu’elle t’a dit tout ça ! D’ailleurs, après que j’ai eu lu sa lettre, je lui ai dit : “Ce que tu es rosse !” Si j’ai mis derrière “lu et approuvé”, c’était simplement au sujet de la dite déclaration qu’elle prétendait t’avoir faite.

Pour le moment, je ne sais pas quand je la reverrai ? J’ignore l’endroit où elle se trouve actuellement. Est-elle partie à Nice ? Je n’en sais rien. Quand elle ne saura pas quoi faire, elle m’écrira certainement selon sa noble habitude.

J’admire toujours mes trois photos et ça me fait mal au coeur en pensant qu’il va falloir m’en séparer, tout au moins de deux. Celle en pieds remporte décidément tous les suffrages auprès de moi. Aussi, j’espère bien la garder.

Tantôt, je vais chez Loulou, aussi je te quitte bien vite car je suis assez en retard.

En espérant que mon Loul Aimé se porte toujours bien, je termine ce petit mot en lui envoyant de bien tendres bécots de sa gosse qui pense sans cesse à lui,

Mino

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