Dans l’indécision

Le 21 Septembre 1917

Petit Loul Aimé,

Je suis désolée, j’ai téléphoné chez toi ce matin et je ne suis toujours pas plus avancée qu’hier. C’est Madame Sevette qui m’a répondu et elle ne sait toujours rien au sujet de notre départ. Elle ne sais pas si Monsieur Sevette obtiendra un permis pour aller là-bas.

Il faut que je re-téléphone demain à 11 heures pour être sans doute pas plus avancée qu’aujourd’hui.

Je crois que si ça continue, on ne partira pas. Je préfèrerai le savoir tout de suite que de te faire attendre ainsi. Il n’y a rien de plus ennuyeux que d’être dans l’indécision. Je m’ennuie beaucoup en pensant que tu pourrais être près de moi et que je suis obligée de te dire d’attendre. Je l’ai dit à Madame Sevette ce matin : “Ce pauvre Lucien doit être bien impatient, il peut venir et nous le faisons attendre.” Elle m’a répondu : “Il vaut mieux qu’il attende quelques jours afin que la fin de sa permission se trouve avec le commencement de celle de Pierre.”

Pauvre Loul ! C’est bien dur de se savoir libre et de ne pas pouvoir venir. Enfin, j’espère que demain nous serons fixés.

J’ai reçu hier au soir ta mignonne lettre du 18 et je vois avec quelle impatience tu attends ma réponse. Pauvre chéri, cela m’a fait doublement de la peine, tu as l’air si content !!!

En plus de ça, tu es très mal logé, quand tu pourrais être si bien chez toi pendant 15 jours. Vraiment, ce n’est pas de veine.

J’ai vu un cheval pie Mardi dernier, j’espère qu’il va nous porter bonheur.

Je n’ai encore rien préparé pour partir. Ce n’est pas la peine si nous restons là.

En ce moment, je ne sais pas quoi faire, je suis énervée, c’est effrayant, aussi je vais aller me promener un peu. J’irai sans doute jusqu’aux Galeries.

A part ça, rien à te dire.

En espérant avoir une réponse demain, je te quitte mon petit chéri en t’envoyant de bonnes cerises de ta sale gosse qui s’ennuie beaucoup,

Mino

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