Le 8 Septembre 1917

Mon petit chéri,

J’ai reçu hier au soir ta mignonne lettre du 5. Elle était seule dans la boîte aux lettres. Aussi on m’a traité de veinarde !

Si tu as été à ton escadrille, tu a du trouver de belles lettres ! Pleines de désespoir et de larmes ! Pauvre Aimé, je suis bien méchante et te donne beaucoup de tourments. Je suis une sale gosse, tu as bien raison de le dire souvent. Il faut me pardonner petit chéri, j’étais si malheureuse de ne pouvoir être, par ma faute, près de toi. Je suis une petite tête sans cervelle qui se sent perdue loin de toi. Je t’aime tant, mon Loul !!!!! qu’un rien qui nous sépare me met tout de suite hors de moi. Voilà ce que c’est que d’avoir des nerfs.

Monsieur Fleuriel qui ne me connait presque pas m’a tout de suite jugé pour une personne très nerveuse. Dame, je veux bien aller à la pêche, mais à condition que ça morde. S’il faut que je reste 4 heures de temps sans bouger, cela ne me va plus.

Ce matin, nous avons été, Mlle Suzanne et moi. Monsieur Fleuriel est venu nous retrouver après. Nous avons fait une très bonne pêche : 12 carpes en tout. 2 M. Fleuriel, 4 Mlle Suzanne et 6 pour moi. J’étais très contente de moi et je m’y amuse beaucoup. J’ai demandé à y retourner tantôt. Nous irons vers 4 heures, c’est tout près d’ici, dans une mare de ferme. C’est noir de poissons !

Ce qui me déplait, c’est que les arbres qui bordent cette mare servent de nid aux guêpes. Aussi qu’est-ce que mes pauvres joues prennent ! Hier, Monsieur Fleuriel a été forcé de me percer une cloque tant elle était devenue grosse. On ne voyait plus ma figure. Aujourd’hui, ça va mieux, mais c’est toujours gros.

Ce matin, j’avais une guêpe dans les cheveux, je t’entendais bourdonner et impossible de la chasser. J’avais appelé Mlle Suzanne à mon secours. Elle avait tellement peur, qu’elle m’avait attrapé mon chignon et le secouait de toutes ses forces. Résultat : la guêpe était dans ses cheveux. Heureusement qu’elle n’est pas restée longtemps. Ici, c’est agaçant pour ça, on est dévoré par les moustiques, les guêpes, etc… J’ai les jambes toutes enflées.

Ce matin, j’étais comme un crin, j’ai été réveillée en sursaut par un réveil à 6hm¼. Madame Fleuriel, son mari et sa petite cousine voulaient aller à la messe. Aussi, on avait pris la précaution de remonter la sonnerie du réveil. Moi qui dormais profondément, j’étais en rage. Aussi, j’ai disputé tout le monde. Maintenant, ça va mieux et je ne suis plus en colère.

J’espère avoir de tes nouvelles ce soir. En attendant et en espérant que tu es toujours en bonne santé, je t’envoie mon petit Coco chéri, mes baisers les plus câlins.

Ta sale gosse qui t’adore,

Mino