Gourmand !

Le 31 Juillet 1917

Petit Lou aimé,

J’ai reçu hier tantôt après t’avoir écrit ta mignonne lettre du 28. Tu sais mon chéri, ta lettre du 22 est bel et bien perdue puisque je ne l’ai pas encore reçue. Elle n’a peut-être pas été perdue pour tout le monde ! Ça fait rien, c’est rageant. C’est la première fois que je ne reçois pas une de tes lettres, aussi je suis très en colère. Je ne sais quoi supposer, et qui accuser !!! Enfin, cela n’est pas très clair.

Pauvre petit chéri, qui reste un an sans voir sa sale gosse ! Comme le temps doit paraître long !!! Pauvre coco, j’espère bien que tu vas venir bientôt. Y a-t-il beaucoup de camarades avant toi ? Combien ? Je pensais, si tes parents s’en vont, est-ce que tu viendras tout de même ou attendrais-tu leur retour ? Ou bien irais-tu avec eux ? Ça, ça serait pas drôle pour nous !!!

Ce matin, j’ai reçu une autre mignonne lettre du 29, apportée par ma petite Paulette. Elle est mignonne cette gosse. Sa maman l’avait envoyée demander à la concierge s’il y avait une lettre de son Papa. Il n’y avait rien. Mais elle ne m’a pas oubliée et a demandé : “Et pour Mlle Germaine, il y a t-il quelque chose ?” En effet, et c’est comme ça que j’ai eu ta gentille lettre.

Mon petit chéri qui n’a pas envie de rire ! C’est que cela ne va pas. Petit Lou, je suis sûre que tu t’ennuies beaucoup ? Est-ce vrai ? Il ne faut pas. J’espère bien que tu en cueilleras bientôt, de bonnes cerises. Gourmand !!! Moi aussi d’ailleurs. Ce délicieux fruit me manque beaucoup. Je t’en envoie tout un wagon. Mais je sais bien, celles-là, tu es loin de les aimer comme les vraies. Mais hélas ! Je ne peux faire plus !!!

En espérant que tu es en bonne santé et que tu ne t’ennuies pas de trop, je te quitte mon Loul adoré en t’envoyant les plus douces caresses de ta sale gosse qui est folle de toi,

Mino

 

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