Le 9 Mars 1917

Mon petit chéri,

J’ai reçu ce matin ta gentille lettre du 8, juste un jour à me parvenir. Cela fait du progrès. Je suis désolée que le temps ne se soit pas mis au vilain plus tôt, puisqu’il m’a privé du plaisir de te savoir en mission. Mhmmm !

Es-tu toujours logé à l’hôtel ? Et penses-tu rester à Bar ?

Tu sais, la jeune fille dont je t’ai parlé, qui habite Bar et qui est de passage à Paris en ce moment, elle repart Mardi 13 pour Bar. Elle se chargera d’une lettre pour toi. Comme cela, tu auras des nouvelles toutes fraîches. Elle sera à Bar Mardi soir. Si tu peux passer chez elle, tu auras ma lettre tout de suite. Cette jeune fille est très gentille. Elle n’a plus ses parents et vit avec sa grand-mère. Elle a été jusqu’à me proposer si je voulais aller te voir de me faire passer pour une parente. Malheureusement, tu dois savoir qu’il m’est absolument impossible de tenter pareille chose. Si tu veux, pour que mes lettres arrivent plus vite, je pourrais les adresser chez elle ? Je te joins son adresse, je vais la récrire ici de peur qu’elle s’égare :

Mlle Yvonne Thévenin
15, place Reggio – Bar

Si je pouvais ! Avec quel plaisir je partirais à sa place ! Elle qui préfèrerait rester à Paris.

Je te disais hier que j’attendais Marie-Louise, mais elle n’est pas venue. J’ai reçu ce matin de ses nouvelles. Ne la voyant pas et vu le temps, je ne m’étais pas inquiété.

Cette pauvre gosse n’a vraiment pas de veine ! Elle n’a pu venir parce que sa mère est tombée brusquement malade. Elle a été obligée d’aller à la recherche d’un médecin à 3h½ du matin. Elle a fait tout le quartier, aucun n’a voulu se déranger. Je la vois d’ici, cela ne devait pas être gai ! Heureusement, sa mère est hors de danger à présent.

Je vais terminer là mon bavardage. En espérant que tu es toujours en bonne santé, je t’envoie mon petit Lou Aimé mes plus tendres baisers de celle qui t’adore,

Mino

PS : Ton costume a été un peu long à te parvenir. Etait-il en bon état ? Le sac de couchage y était-il ? Je suis bien contente pour toi qu’il te soit parvenu mais je le suis aussi pour cette pauvre Madame Sevette qui avait été accusée d’avoir mal fait le paquet !