43 km à vélo

Paris, Le 2 Aout 1916

Mon Loulou adoré,

J’ai reçu tes gentilles lettres du 30 et 31. Décidément, votre centre n’a pas de chance en ce moment. Tu me dis qu’Hebert est breveté. Et Rivière ? Quand vous êtes breveté, est-ce que vous partez tout de suite ?

Mon petit chéri, je ne t’ai pas écrit hier, car j’ai été à bicyclette et suis rentrée très fatiguée. Je ne voulais même pas y aller, mais ça m’ennuyait de refuser à Suzanne et Loulou.Qu’est-ce qu’elles m’ont fait avaler comme kilomètres !!!

Je n’en pouvais plus. Moi qui ne me sentait déjà pas très bien, je me suis énervée sur cette bicyclette, aussi je n’y allais pas, je volais. Mieux que ça, à mon grand étonnement, j’ai monté la côte de Charenton. Suzanne nous avait prévenu de descendre, mais j’étais tellement emballée qu’elles m’ont suivie et je suis rentrée après avoir fait 43 kilomètres. C’est bien, je trouve. Et aujourd’hui, je craignais de nouveaux maux de tête, je me porte très bien et je mange comme six. C’est radical, comme remède. Donc je conclue qu’il me fait de l’air.

J’ai a te répondre au sujet de ta lettre du 29. Tu te trompes mon chéri, je ne t’en veux pas “dans le fond” comme tu dis. C’est à moi seule que j’en veux. J’ai été une imprudente et par ma faute, aussi je suis loin de t’en vouloir. J’ai lu, en souriant, les belles promesses que tu fais sur cette lettre. J’en prends note car j’espère que tu les tiendras.

Tu recevras sans doute une carte de Crosnes, lieu de notre promenade d’hier. C’est très joli par là. J’ai rapporté de ce pays si charmant de charmants coups de soleil, aussi j’ai les bras écrevisse.

J’espère que tu prends de bons bains et que tu es toujours en bonne santé.

Dans l’attente du plaisir de te lire, je t’envoie mon chéri mille baisers de ta fiancée qui t’adore,

Germaine

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