Faire ce que bon me semblera

Paris, Le 22 Mars 1916

Mon petit chéri,

J’ai reçu ce matin ta gentille lettre du 20 qui m’a fait grand plaisir. C’est la première depuis mon retour de Dijon. Figure-toi que je suis bien ennuyée. Cet après-midi, j’attendais ta mère et ta soeur qui devaient venir prendre des nouvelles. Avant leur arrivée, je m’étais mise à t’écrire espérant avoir le temps de finir ma lettre, malheureusement elles sont arrivées avant et ta lettre est restée. Aussi, celle-ci ne partira que demain, ce qui fait que tu seras un jour sans nouvelles, ce qui est la cause de mon ennui. Enfin, j’espère que tu ne m’en voudras pas, d’ailleurs, je sais que tu en es incapable.

Comme toi, je trouve que les minutes passées ensemble ont été bien courtes. Je n’aspire qu’au bonheur de recommencer. Je trouve aussi que la séparation a été moins dure que les fois précédentes. Il faut dire qu’elle a été précédé d’un doux moment. Tu comprends, cette fois-ci, je t’ai quitté dans l’espoir de te revoir bientôt et je te sais en sécurité, ce qui est une grande chose à côté des autres fois.

Ton père doit aller je crois te voir Dimanche avec la voiture. Je voudrais bien être à sa place, car je trouve très à mon goût la ville de Dijon et surtout la personne qu’il va voir.

Ça ne me gênerait pas d’y retourner, je m’habituerais je crois vite à faire ce petit voyage. Malheureusement, il ne faut pas en demander de trop, et il ne tient pas que de moi d’y aller tous les huit jours. S’il en était autrement, je n’en bougerais pas tant que tu y serais. Mais je crois qu’il fera plus chaud qu’aujourd’hui quand je serai libre de faire ce que bon me semblera.

Enfin, je ne me plains pas, j’ai eu le bonheur de te voir, c’est déjà ça.

En attendant une gentille lettre, je te quitte mon petit chéri en t’envoyant tous mes plus doux baisers.

Celle qui pense bien à toi,

Germaine

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