Cauchemar

Paris, Le 6 Février 1916

Mon Loulou chéri,

Comme je le pensais dans ma lettre d’hier soir, j’ai reçu ce matin ta gentille lettre du 4. Console-toi, ces maudits boches ne sont pas revenus nous voir, pourtant je croyais bien les voir hier. Malgré tout, je me suis bien passé de leur visite. Ce qui m’agace, c’est que j’en rêve presque toutes les nuits. Encore hier, nous étions tous les deux en train de visiter les décombres, et je t’assure que cela n’avait rien d’amusant, car pour te retrouver, il fallait que je traverse un terrain vague remplit de rats. Tous les jours, c’est le même genre. C’est agaçant !!!

Tu me dis que tu espères que mon mal de dents est passé. Malheureusement non. J’y ai, je crois, de plus en plus mal. Je suis réduite à ne manger que de la mie de pain. Il faut voir aussi comme je suis de bonne humeur en ce moment. Je suis tout le temps en colère. Vendredi dernier, j’ai fait une de ces comédies au dentiste, qu’il n’osait plus me toucher. Au lieu de me faire des compliments, il m’a dit que j’étais insupportable. Il est vrai qu’il ne m’avait pas fait du bien. Enfin j’y retourne demain, j’espère qu’il me donnera un calmant.

J’espère aussi que de ton côté la santé est toujours bonne. Dans cet espoir, je termine mon chéri, en t’embrassant bien tendrement,

Celle qui t’adore,

Germaine

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