Paris, Le 19 Septembre 1915

Mon tendre chéri,

J’ai reçu hier au soir ta gentille lettre du 10, me racontant les exploits de Marcel. Il travaille bien. Tous mes compliments. Si je trouve une carte de cycliste les quatre fers en l’air, je ne manquerais pas de lui envoyer.

J’ai été aujourd’hui aux Invalides voir les trophées pris aux Bôches. C’est la première fois que j’y vais. J’étais avec des amis, mais que de monde ! J’ai vu un taube capturé dans la Meuse, je ne me souviens plus de la date. On en voit tellement ! Ce qui prime le plus, c’est les canons de 77. On voit un obus de 420. Il est aussi grand que moi. J’ai vu aussi pour la première fois un 75 mais dans quel état !

Pour voir les drapeaux, il fallait presque se battre. Aussi nous les avons laissés de côté. Ce qu’il y avait de plus drôle, c’est que dans la foule, nous avons perdu le père de mon amie (qui est une amie à Madeleine plus qu’à moi). Enfin après un assez long moment nous avons eu la chance de nous retrouver.

Ce soir, je suis assez fatiguée. J’ai surtout mal aux pieds. On m’a tellement marché dessus cet après-midi ! Et avec ça, il faisait une chaleur étouffante.

J’espère que tu es toujours en bonne santé. Chez nous, cela va assez bien.

En attendant de tes nouvelles, je t’envoie mon petit Loulou de doux baisers.

Celle qui pense bien à toi,

Germaine