Deuxième bain

St Quay Le 22 juillet 1915

Mon petit chéri,

Je suis rentrée à bon port à St Quay. Le voyage a été pour moi très triste et m’a semblé beaucoup plus long que lorsque je suis partie pour Paris. Malgré tout, je suis très heureuse de ces deux jours passés au près de toi. Ils m’ont semblé si courts.

J’ai reçu ce matin ta lettre du 21 contenant ta photo. Mon pauvre chéri, quelle figure tu as sur cette photo. Toi qui es si gentil. On ne t’a pas avantagé, au contraire. Toi qui as un regard si doux, tu as sur cette photo un regard tout ce qu’il y a de plus dur. Tes parents seront sans doute pas très satisfaits. Espérons que la seconde sera mieux réussie.

J’ai pris ce matin mon deuxième bain, mais le temps est peu favorable. J’étais partie de bonne heure en excursion pour le Palus près Paimpol, j’ai été tout ce qu’il y a de plus vannée, cela peu compter pour un troisième bain. Il fait un vent de tous les diables. Cette nuit, un arbre du jardin s’est cassé.

Toi mon petit chéri tu dois approcher des lignes en ce moment. Je ne recevrais plus de tes nouvelles pendants quelques jours, mais je suis tout de même tranquille puisque je te sais en voyage. Tu trouveras à la page d’à coté ma petite poésie faite à ton intention qui renferme tout mon amour pour toi.

J’espère que ma lettre te trouvera en bonne santé, dans cet espoir, je t’envoye mon petit chéri mes plus doux.

Celle qui t’aime,

Germaine

A mon bien aimé

Qu’importe

Qu’importe la guerre, présente l’heure qui sonne
Le temps qui fuit sur nous, les roses de l’été
Les feuilles qui s’en iront sous le vent de l’automne
Qu’importe quand nous serons encore tous les deux pour nous aimer

Qu’importe quand tu viens près de moi si joli
Quand je sais que je t’aurai pour moi bien des jours
Qu’importe que le monde tourne et nous oublie ?
Qu’importe son oubli, quand nous aurons l’amour

Non, non laisse tomber les heures une à une
Laisse les hommes vains s’agiter sous les cieux
Les étoiles, le soir briller dans la nuit bonne
Car les étoiles sont moins belles que tes yeux…
Germaine

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