Ton camarade de tennis est mort

Paris, Le 30 Mars 1915

Mon petit chéri,

J’ai reçu ta gentille lettre du 24 Dimanche, et je ne te réponds qu’aujourd’hui Mardi. Quelle vilaine je fais !

Mon Loulou chéri, ce n’est pas de ma faute. En ce moment, je ne me sens pas bien du tout. Je ne sais si c’est le printemps qui me rend malade, mais depuis quelques jours, je ne me tiens pas debout. Je me sens très fatiguée. J’attribue ce malaise général au brusque changement de température. Depuis le commencement du mois, il faisait très beau et très chaud. En ce moment, il tombe de la neige et fait excessivement froid.

Surtout ne t’inquiète pas. Si je te dis ceci, c’est pour te montrer qu’il m’a été impossible de t’écrire ces jours-ci. Mais n’ait crainte, j’ai beaucoup pensé à toi. Je me suis même dit que si tu étais près de moi, tout cela n’arriverait pas.

Enfin, je suis sûre qu’en voyant ton portrait chéri, je serai complètement remise. Aussi, je te recommande de me l’envoyer bientôt. Je suis d’une impatience sans borne.

J’espère que toi, tu es toujours en bonne santé et que tu es toujours à St Marc-le-Mont.

J’ai vu Madeleine Dimanche qui m’a quitté en me disant “Souhaite le bonjour à ton mari”. Je fais la commission telle qu’on me la dite.

Je vais m’ennuyer pendant les fêtes de Pâques. Madeleine s’en va chez sa grand’mère à Amiens. Il est vrai que toi, tu ne t’amuseras pas beaucoup, il me semble. Elle m’a dit de te dire qu’un de tes anciens camarades de tennis, Charles Caillet est mort des suites de ses blessures.

En attendant impatiemment ta photo, je t’envoie mon adoré mille doux baisers de ta petite fiancée,

Germaine

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