Galons rouges

Paris, Le 30 Janvier 1915

Mon petit Loulou,

J’ai reçu ce matin ta lettre du 28 Janvier contenant le menu du dîner par tes camarades et signé par eux tous. J’ai été vraiment touchée de cette marque de sympathie envers moi, surtout de la bonté de ton sergent  à bien vouloir m’adresser ces quelques mots ; je lui en suis très reconnaissante.

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Les deux galons rouges de caporal sont fixés sur la manche

J’ai trouvé dans l’enveloppe écrite par le sergent des effilochures rouges qui doivent provenir de tes galons, aussi je les ai mises précieusement dans un petit médaillon, que je porte à mon cou. Ce médaillon contenait auparavant un de tes cheveux que je t’avais pris un soir à Cayeux dans la cabine Gaston ; mais que j’ai perdu il y a trois mois.

Voici comment ce petit malheur est arrivé : je voulais mettre ma photo dans ce médaillon aussi j’avais retiré ton cheveu et je l’avais déposé sur la table, mais lorsque j’ai voulu le remettre, plus rien. Le tapis de la table étant foncé, je n’ai rien retrouvé à mon grand regret, car j’y tenais beaucoup puisque c’était moi-même qui te l’avais arraché, entre deux baisers.

J’espère que tu es toujours en bonne santé. A Paris, il fait en ce moment très froid, mais cela n’a guère d’importance, nous sommes favorisés du sort, à coté des pauvres soldats.

En attendant de tes bonnes nouvelles, je t’envoie, petit caporal de mon coeur, mes baisers les plus doux.

Ta petite promisette qui t’aime,

Germaine

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