Paris, Le 16 novembre 1914
Mon petit chéri,
J’espère que tu es toujours en bonne santé. As-tu reçu ma dernière lettre marquée de petits points noirs ?
J’ai passé hier un bon dimanche aussi afin de te distraire un peu dans ta tranchée, je vais te le conter.
Te rappelles-tu la dame qui est venue chez nous à Cayeux passer trois semaines, et bien elle fait partie de la Croix-Rouge et depuis la guerre elle a été nommée directrice d’un hôpital auxiliaire franco-belge à Paris, je vais la voir très souvent (surtout pour voir ses blessés).
Monsieur Taride a offert un million de cartes sur les opérations de la guerre à la société afin que celle-ci les vende au profit des blessés.
Elle m’a demandé de bien vouloir en vendre. Chose que j’ai accepté avec grand plaisir, que ne ferais-je pas pour nos chers soldats (surtout un en particulier). Et avec une de mes amies depuis le matin jusqu’au soir nous avons parcouru les avenues, les rues du quartier de l’étoile et de la Porte Maillot offrant nos cartes et nos petits drapeaux. Mais malheureusement il faisait très vilain temps, la pluie n’a pas cessé de tomber de la journée.
La porte Maillot qui est si animée le dimanche était déserte de promeneurs. Nous ne nous sommes pas désolées pour si peu, puisque les gens restaient chez eux, nous avons été les trouver chez eux. Et nous avons fait ainsi une cinquantaine de maisons du premier au septième. Mais nous n’étions pas fatiguées du tout, nos soldats en endurent encore plus que cela, nous pouvons bien faire cela pour eux. N’es-tu pas de mon avis ?
Nous avons été récompensées en sachant la somme faite 130F60, nous tenions le record, c’était la somme la plus forte faite dans la journée. Quelle joie pour nous deux.
J’espère recevoir de tes nouvelles ces jours-ci. En attendant, je t’envoie mon petit chéri mille affectueux baisers, reçois-les de celle qui t’aime et qui ne pense qu’à toi,
Germaine
Tu vois, j’ai pensé à toi, j’ai mis ces trois drapeaux de coté dimanche rien que pour toi. Je pose sur chacun grand nombre de baisers. Germaine
