Paris, le 2 septembre
Mon cher petit Lucien,
J’ai reçu deux lettres de toi qui m’ont fait grand plaisir de te savoir toujours en bonne santé. Je n’ai pas pu te répondre plus tôt malgré mon grand désir de te faire parvenir de mes nouvelles.
Je suis de retour à Paris depuis dimanche 30 août, mais je puis t’assurer que cela n’a pas été sans mal. Les chemins de fer du Nord ne circulant plus, mon père craignait que je ne puis plus revenir, aussi est-il bien vite venu me rechercher. Nous avons fait un voyage bien fatiguant car le seul moyen de retour était de se faire conduire à Eu en voiture. De Eu, prendre le chemin de fer et passer par Dieppe pour revenir à Paris.
Je préfère être rentrée je me sens plus en sécurité, la Somme commençait à être investie d’allemands et à Cayeux c’était la panique. Je me demande avec anxiété si à l’heure qu’il est, tu es encore debout. J’ai su des nouvelles de ton régiment par un jeune homme qui se trouvait dans le même compartiment que moi, et elles n’étaient pas très bonnes, il m’a dit à quel endroit il se trouvait et que vous vous étiez déjà battus, et que le 72e marchait avec vous.
J’ai trouvé en arrivant à Paris une lettre de Marcel me disant être sans nouvelles de toi depuis 15 jours ; il n’est pas encore parti, ce qui ne va peut-être pas tarder.
Lorsque tu m’écriras à présent sois assez bref, car mon père pourrait trouver à redire et je tiens essentiellement à recevoir de tes nouvelles.
Dans l’espoir que ma lettre te trouvera en bonne santé, je t’envoie mon petit chéri de tendres baisers.
Celle qui t’aime et qui pense bien à toi
Germaine,
112 Avenue Ledru-Rollin
