Le bruit de guerre court en ce moment

Cayeux, le 28 Juillet 1914

Mon petit chéri,

J’ai reçu ta bonne lettre qui m’a apporté un peu de foi, j’en avais bien besoin. Depuis deux jours j’ai versé bien des larmes si tu savais tout ce que Papa m’a dit après ton départ. Tu me demandes si je t’en veux, pauvre petit chéri, ce n’est pas à toi que j’en veux toi qui es si gentil, mais à Papa qui m’a dit de bien vilaines choses. Il a trouvé très mal de ma part de l’avoir laissé tout seul presque toute la journée et de m’être enfermée dans la cabine avec trois jeunes gens. Que voulais-tu que je réponde ? Je lui aurais bien répondu mais j’avais peur de me compromettre. Il est parti très en colère après moi me disant qu’il ne reviendrait plus me voir.

Juge dans quel état j’étais dimanche soir, j’étais déjà ennuyée de n’avoir pas pu te reconduire à la gare, ensuite Papa m’attrape et pour finir ma journée, la bonne me donne ses huit jours, me voilà toute seule. Heureusement que ma pensée est toujours avec toi, ce qui me fait oublier toutes ces petites misères.

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Ce qui m’ennuie le plus, c’est ce bruit de guerre qui court en ce moment, on entend tout le monde en causer. Je souhaite que tout cela s’arrange pour la tranquillité de tout le monde et pour notre bonheur à tout deux.

Je viens de voir Marcel qui est très ennuyé car il a un ressort de cassé à sa moto.

Merci à ton camarade pour ses bons sentiments, présente lui mon meilleur souvenir. Et pour toi, cher Lucien, reçois mes plus tendres baisers.

Celle qui t’aime,

Germaine

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