Marcel doit se présenter au conseil de révision

Cayeux, le 16 Juillet 1914

Mon petit chéri,

Marcel m’a bien remis ta bonne lettre hier et grâce à lui ton rêve s’est réalisé, je suis on ne peut plus contente chaque fois que je lis de tes gentilles lettres, mon bonheur est si grand que je les relis une dizaine de fois dans la journée, comme tu vois je fais durer le plaisir le plus longtemps possible, mais une pauvre feuille de papier ne peut pas te remplacer et il y a des moments où la tristesse et la mélancolie reprennent le dessus ; et pour ça rien à faire. Surtout quand on a un crampon comme j’en ai un, je voudrais que tu voies l’installation que j’ai pour t’écrire. Je suis dans mon lit assise une boite sur les genoux, cette feuille de papier dessus et l’encrier sur la table de nuit afin de ne pas réveiller Madame qui couche la chambre au-dessous de la mienne ; si par malheur elle m’entendait marcher, je la réveillerai plus tôt que d’habitude et elle serait de mauvaise humeur pour toute la journée.

Papa ne vient pas dimanche prochain, est-ce que j’aurai une agréable surprise ?

Marcel a reçu un avis de se présenter aujourd’hui au conseil de révision et il est parti hier soir par le même train que Papa. Il doit revenir demain ou samedi, il faisait une drôle de tête à la gare. Je voudrais bien qu’il revienne pour dimanche si quelques fois tu venais qu’il puisse aller te chercher à Noyelles avec sa moto ; tu arrives toujours plus vite qu’avec le train. Mais il ne faut pas que je me fasse des illusions, les dimanches se suivent mais ils ne se ressemblent pas toujours.

Dans l’espoir que ce sera une bonne journée pour nous, je t’envoie mon chéri de gros baisers.

Celle qui ne pense qu’à toi,

Germaine

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